Archevêché des églises orthodoxes de tradition russe en Europe occidentale

Patriarcat de Moscou

Rapport d’Activité de l’Administration Diocésaine et du Conseil de l’Archevêché

Votre Eminence, Excellences, Révérends Pères et Mères, frères et sœurs en Christ,

C’est en conformité avec nos statuts que nous avons décidé de présenter ce rapport.
Il se divisera en trois parties : Quelques éléments factuels sur l’activité du CA , d’abord, un panorama des activités de l’Administration Diocésaine, ensuite, et quelques mots de perspectives et de conclusions, enfin.


A. Rapport de l’activité du Conseil de l’Archevêché

1.Composition du Conseil.
Comme vous le savez notre Conseil est statutairement composé des évêques de notre Archevêché et de douze membres élus, six clercs et six laïcs. Il y a trois ans, à l’issue de l’AG de 2004, le conseil était ainsi composé de notre archevêque, de l’évêque Michel, de six membres du clergé : trois élus en 2004 ans pour une période de six ans : les Pères Job, Eugène Czapiuk et Jean Roberti et trois autres, les Pères René Dorenlot, Nicolas Rehbinder et Jean Gueit, élus trois ans auparavant en 2001. Cette composition initiale s’est trouvée modifiée à la suite de la décision du Père Nicolas Rehbinder de démissionner de son poste au Conseil. Cette démission entraîna l’entrée au Conseil de l’Archevêché du premier clerc figurant sur la liste des suppléants à savoir le Père Alexis Struve. Le mandat de ces trois clercs, les Pères René Dorenlot, Jean Gueit et Alexis Struve, vient à échéance avec cette AG. Le Conseil de l’Archevêché a aussi vu, conformément à ses statuts l’entrée de Mgr Basile en qualité d’évêque auxiliaire nommé dans notre Archevêché par le Patriarche Bartholomée.

Les six membres laïcs du Conseil de l’Archevêché sont : d’une part, Ivan Chéret, trésorier, Nikita Struve et votre serviteur, tous trois élus il y a trois ans et dont le mandat se prolonge encore pour une durée égale. D’autre part, Tatiana Chomcheff, Antoine Nivière et Pierre Sollogoub dont les mandats viennent aujourd’hui à échéance.

2. Réunions.
Nous avons tenu une réunion toutes les six semaines environ, soit au total 25 réunions. Ces réunions se tiennent habituellement un soir de semaine, le mercredi ou le jeudi soirs. Monseigneur Michel n’a jamais participé à ces réunions. Pour les autres membres du Conseil , la plupart ont pu régulièrement être là, même si c’était évidemment plus difficile pour les personnes venant de loin comme le Père Jean Gueit et le Père Jean Roberti. Sous la présidence de Monseigneur l’Archevêque Gabriel le Conseil traite, les affaires courantes et fixe les grandes orientations de la vie de notre Archevêché. Il a organisé une réunion de travail spécifique le 23 juin 2005, à laquelle furent invitées des personnalités extérieures. Trois communications y avaient été présentées : “Les conclusions des travaux de la commission Avenir de l’Archevêché” (Archiprêtre Wladimir Yagello), “Point de vue sur la situation de l’Archevêché et de l’Eglise orthodoxe en Occident en juin 2005” (M. Séraphin Rehbinder), “Quel avenir pour l’Archevêché ?” (Archiprêtre Alexis Struve). Une autre séance du conseil a revêtu un caractère exceptionnel : celle qui a consisté en une réunion conjointe du tribunal ecclésiastique et du Conseil, en mars 2006, au sujet de questions relatives à la discipline et à l’ordre canoniques. Pour ce qui est du fond de nos travaux il est largement porté à votre connaissance par les communiqués que nous publions à l’issue de chacun de nos conseils.

3. Communication sur les réunions du Conseil.
A la suite des remarques formulées à l’encontre des communiqués du Conseil lors de notre dernière Assemblée Générale, nous avons essayé de donner des communiqués plus détaillés, tout en maintenant une certaine confidentialité, nécessaire parfois, et surtout accessibles en plusieurs langues : aujourd’hui les communiqués paraissent systématiquement en français, russe, anglais et néerlandais. Ces communiqués sont désormais envoyés par voie postale et/ou par courrier électronique. Nous les mettons également en ligne sur le site internet que nous avons créé. Nous serons heureux de bénéficier de vos remarques pour améliorer ce service de communication qui est tellement important. Les communiqués sont-ils trop longs, ou pas assez ? Nous souhaiterions diffuser plus largement par internet – c’est tellement facile et tellement bon marché, tout en continuant à utiliser la voie postale pour ceux qui ne sont pas branchés sur internet. Nous vous demandons de bien vouloir indiquer si vous voulez continuer à recevoir ces communiqués par la poste. Nous vous demandons de remplir avec soin la feuille de demande de renseignements que nous vous faisons circuler afin que nous puissions mettre à jour nos listes qui sont largement dépassées.


B. Rapport d’activité de l’Administration Diocésaine

1. L’Administration diocésaine.
Statutairement elle est composée du secrétaire du Conseil de l’Archevêché élu par le Conseil, votre serviteur, et du Trésorier, M. Ivan Chéret, élu également par le Conseil. Monseigneur l’Archevêque Gabriel a également souhaité leur associer le Père Archimandrite Job et M. Antoine Nivière, chargé des questions de communication. Pour assister de façon permanente Monseigneur l’Archevêque Gabriel, l’Administration Diocésaine a pu bénéficier du travail du Père Serge Sollogoub, de septembre 2005 à décembre 2006. Depuis, le poste de secrétaire administratif auprès de Monseigneur l’Archevêque Gabriel et de l’Administration Diocésaine est vacant, mais nous avons bon espoir de le pourvoir très bientôt, mais dans de conditions différentes?

2. Réunions hebdomadaires de l’Administration Diocésaine.
L’Administration Diocésaine se réunit régulièrement une fois par semaine. Depuis qu’il a été élu Doyen de l’ITO, le Père Job se consacre exclusivement à cette tâche et ne participe plus à ces réunions. Ces réunions sont l’occasion d’un échange de vues et d’information sur les événements de la semaine et l’état d’avancement des différents dossiers en cours, de préparation des visites et des voyages de Monseigneur l’Archevêque Gabriel, ainsi que de la préparation des réunions du Conseil de l’Archevêché .

3. Activité administrative.
Outre la diffusion des informations concernant l’activité du Conseil de l’Archevêché, le rôle essentiel de l’Administration Diocésaine est d’administrer : il s’agit essentiellement de tenir à jour les dossiers de chaque clerc et de chaque paroisse, ainsi que les registres de baptêmes de mariage et de décès des différentes paroisses. Je rappelle que celles ci sont tenues de faire parvenir tous les ans à l’Administration Diocésaine une copie de ces registres, ainsi que les compte rendus de leurs AG annuelles. Il faut dire que ce travail administratif est facilité par la tenue des registres réalisée par l’équipe précédente.

4. Base de données.
Nous avons commencé à construire une base de données facilitant la gestion de nos envois essentiellement. Elle est en cours de complète révision grâce au dévouement d’une personne qui s’est proposée pour le faire, M. Philippe Capony. Grâce à cette base de données, nous l’espérons, les communications seront plus faciles entre nous et moins chères.

5. Communication : site, annuaires et Messager diocésain.
Une grande innovation de la période écoulée a été la création d’ un site Internet grâce au dévouement de quelques personnes : Alexandre Lacaille, le Père Serge Sollogoub, Antoine Nivière, Irina Krivova et, surtout, Jean Starynkévitch, qui en est le webmaster. Ce site permet de diffuser les informations concernant le diocèse et de mettre en ligne les communiqués et déclarations officiels, mais aussi des documents de toute sorte sur notre histoire, la situation présente, l’annuaire, etc. Il est appelé à se développer et est un outil important pour faire connaître notre Archevêché. Le site va se développer en plusieurs langues et nous tenons particulièrement aussi à le développer en langue russe. Je suis persuadé que la tradition de l’école de Paris, celle que vit et continue à vivre dans sa spécificité notre Archevêché est très importante pour les chrétiens de Russie même, comme nous en avons de nombreux témoignages.

Un nouvel annuaire a également été préparé à l’occasion de cette assemblée. Il est dès à présent à votre disposition. Par contre, notre revue, le Messager diocésain, marque le pas. Un nouveau numéro vient tout juste de paraître, mais, d’une manière générale, reconnaissons-le, sa périodicité n’est pas assez régulière. Peut-être, avons nous accordé trop d’attention à la mise en place du site Internet, et peut-être pas assez à la liaison avec l’équipe du Messager. Peut-être aussi faut-il renforcer cette équipe. et qu’il faut penser à une relève. C’est l’occasion de lancer un appel. S’il y a parmi vous des personnes qui veulent s’impliquer dans ce travail, je suis sûr que l’équipe actuelle de rédaction du Messager diocésain sera heureuse de les rencontrer et de voir comment les intégrer, suivant les possibilités de chacun.

6. Assemblées pastorales et conférences diocésaines.
Nous avons organisé au cours de ces trois années deux assemblées pastorales et deux conférences diocésaines. Un compte rendu détaillé de la première assemblée a été fait sous forme de communiqué et l’essentiel de ses communications vient de paraître qui s’intitule « Construire « .

La seconde assemblée pastorale avait un thème plus pastoral puisqu’elle portait sur le sacrement de pénitence. Nous espérons la voir publiée également prochainement.
Comme Monseigneur l’Archevêque Gabriel vous l’a dit, il a été décidé d’organiser des conférences diocésaines ouvertes tous, clercs comme laïcs, à l’image de ce qui pouvait se passer autrefois. Là aussi deux de ces conférences ont été proposées qui ont toutes deux été organisées ici même à l’Institut. La première portait sur le thème ‘construire l’Eglise locale ‘ et avait été prononcée par Mgr Kallistos Ware en 2005 et la seconde marquait le début de la célébration des soixante ans du rappel à Dieu du fondateur de notre diocèse le Métropolite Euloge. Ce soixantième anniversaire a été l’occasion d’un certain nombre d’autres manifestations qui se sont étalées tout au long de l’année universitaire qui s’achève : Monseigneur l’Archevêque Gabriel a prononcé une conférence à Deventer. Et au cours de mes déplacements à Toulouse et à Nice j’ai également eu l’occasion de rendre hommage à la mémoire de Mgr Euloge dans des conférences que j’ai données là-bas. La dernière manifestation de cette série a eu lieu tout récemment le 18 mars dernier à la maison de l’ACER précisément sur le thème des relations entre l’ACER et le Métropolite Euloge. Avec la parution de la traduction française du livre autobiographique de Mgr Euloge, « Le chemin de ma vie » publié par les Presses de Saint Serge, une plus grande connaissance de son œuvre est maintenant accessible et elle ne manquera pas de nous inspirer au cours des prochaines années.

7. Catéchèse des nouveaux immigrants.
Monseigneur l’Archevêque Gabriel vous a indiqué que nous avons développé au niveau de notre diocèse une formation des nouveaux arrivants. Le Père Wladimir Yagello, qui a été nommé en charge de ce service, fera un rapport détaillé de cette activité en son temps.

8. Visites dans les paroisses.
Les relations entre l’Administration Diocésaine et les communautés paroissiales sont essentielles pour la vie de notre Archevêché. Au cours de ces trois années nous avons été amenés, les uns ou les autres, à visiter en dehors des paroisses de Paris « intra muros », les paroisses suivantes : Colombelles, Lyon, Toulouse, Nantes, Toulon, Nice, Montargis, Londres, Boulogne, Biarritz, Liège. Nous souhaitons les développer.

9. Visite dans les instances administratives et gouvernementales.
Nous sommes naturellement en rapport avec les fonctionnaires en charge des questions religieuses au sein de l’Administration française. Nous entretenons avec eux des relations suivies en les informant des difficultés, des joies et des peines qui sont les nôtres. C’est essentiellement le chef du bureau des Cultes au Ministère de l’Intérieur et le conseiller pour les Affaires religieuses au Ministère des Affaires Etrangères et à la Présidence de la République. C’est souvent grâce à leur intermédiaire que nous avons pu résoudre des problèmes de régularisation de certains documents de nos prêtres en provenance de l’Est.

10. Institut de Théologie Orthodoxe.
Le Père Job, nouveau Doyen de l’Institut Saint-Serge fera tout à l’heure un compte rendu de l’état d’avancement des travaux visant à réformer le mode de fonctionnement de l’Institut. Je mentionne ici ce point pour marquer le soutien de caractère administratif et financier que l’Administration Diocésaine a pu apporter au Père Job dans ce dossier.

11. Défense.
Mais une part importante de notre temps a aussi été consacrée à organiser la défense de notre Archevêché face à ce qu’il faut bien appeler une offensive de la part de ceux que nous considérons pourtant, pour certains d’entre nous, dont je suis, comme nos frères. Je veux évoquer ici brièvement les malheureuses affaires de Biarritz et de Nice. Je serai bref sur l’affaire de Biarritz car nous avons donné sur le site de l’Archevêché tous les éléments vous permettant de vous faire une idée sur la question. Que dire d’une offensive menée dans l’irrespect des règles canoniques de base de la vie de l’Eglise et sans connaissance précise des lois de ce pays et des statuts de l’association ? Une malheureuse affaire, dont l’issue donnera, sans doute, une fois encore – il y a déjà eu au moins trois décisions en faveur de notre association paroissiale -, raison à la paroisse légitime. Actuellement l’affaire est devant la cour d’appel de Pau et doit être jugée prochainement : une dernière audience de procédures doit avoir lieu le 5 juin et l’audience de plaidoiries interviendra sans doute à l’automne.

On nous a souvent demandé pourquoi nous nous sommes engagés dans des affaires judiciaires de cette nature. Après tout il s’agit de l’occupation d’édifices de pierre et l’important réside dans l’ouverture et le lieu du cœur. Rappelons d’abord que l’Archevêché n’est pas engagé en tant que tel dans cette affaire mais c’est bien la paroisse, en l’occurrence l’association cultuelle orthodoxe russe de Biarritz (ACORB), qui est l’intervenante.

Néanmoins il est absolument clair que l’Administration Diocésaine a soutenu l’ACORB comme elle a soutenu l’association cultuelle orthodoxe russe de Nice quand celle-ci en vint à être attaquée à son tour, cette fois par la Fédération de Russie. Nous en acceptons la responsabilité. Pour ce qui est de Biarritz, il y avait d’abord l’appel au secours des membres du Conseil Paroissial qui se sont sentis trompés et profondément blessés d’être dépossédés et chassés de leur église. Il était impossible de ne pas les soutenir et c’est tout naturellement que nous l’avons fait : les membres de l’Administration Diocésaine se sont rendus sur place et ont rencontré le conseil paroissial dans la semaine qui a suivi la réunion de l’AG illégale du 26 décembre 2004.

On nous a aussi reproché de nous être tournés vers les juridictions civiles, alors qu’il fallait tout régler au niveau ecclésial, entre nous. Le lecteur attentif de notre site consacré à cette affaire pourra le constater par lui même : les actions menées par Georges Monjoch et ses partisans avaient d’emblée un caractère juridique puisqu’ils prétendaient réunir une assemblée générale selon les règles civiles de fonctionnement des associations. Toute la procédure engagée le 26 décembre était menée selon les règles civiles et le lundi 27 décembre la liste du prétendu nouveau conseil d’administration de l’association était déposée à la préfecture. Contre une démarche de cette nature dans un pays de droit comme le nôtre il n’y a que la procédure judiciaire pour faire admettre la vérité.

En revanche, après que le jugement en première instance ait été rendu, dans un courrier adressé à Mgr Innocent, en date du 20 décembre 2005, Mgr Gabriel a proposé de régler à l’amiable les suites de ce jugement et de créer une commission chargée de mettre au point les détails de la transition. Mgr Innocent a d’abord accepté le principe d’une telle commission avant de la refuser.

Toute la différence est là : d’un côté, l’Archevêché n’avait pas d’autre moyen que de s’adresser à la justice civile pour faire prévaloir son bon droit. Dès que cela a été possible, Mgr Gabriel a proposé au diocèse de Chersonèse de régler à l’amiable les suites de l’affaire. De son côté, Mgr Innocent a préféré continuer recourir à la justice et faire appel. L’affaire suit son cours. Je voudrais encore insister sur le fait qu’à Biarritz, la procédure d’appel est actuellement engagée par Georges Monjoch et un groupe de personnes, auquel s’est joint comme plaignant le Patriarcat de Moscou, par le biais de son représentant en France, l’archevêque Innocent. À Nice, dont je vais encore parler, la procédure a été engagée contre l’association paroissiale locale par la Fédération de Russie, représentée par son ambassade en France. En tant que tel, l’Archevêché n’a pas eu recours à la justice civile, ceux qui le disent ou l’écrivent ici ou là, ne disent pas la vérité. Cela n’a d’ailleurs que peu d’importance, car rien d’ailleurs n’empêcherait l’Archevêché d’engager une action auprès des autorités civiles pour défendre ses intérêts quand ces derniers sont mis en cause comme il l’a déjà fait dans le passé, à plusieurs reprises.

Donc il y a eu l’affaire de Biarritz, il y a aussi l’affaire de Nice. Là, vous le savez, il s’agit pour la Fédération de Russie de récupérer, pour le dire vite, la propriété de ce qu’elle estime être son bien, puisque le terrain sur lequel est bâtie la cathédrale Saint-Nicolas a été donné par l’Empereur Nicolas II en 1909 en bail emphytéotique (de 99 ans) à l’Eglise russe en vue d’assurer le statut juridique de l’église dont la construction était alors en cours d’achèvement. Ce bail venant à échéance à la fin 2007, l’Etat russe a d’abord voulu faire procéder à un inventaire du bien dont il s’estimait propriétaire. Le Président du tribunal de Nice lui a donné, le 25 novembre 2005, l’autorisation de procéder dans les trois mois à cet inventaire et c’est le 7 février qu’un huissier de justice s’est présenté à la cathédrale Saint-Nicolas à Nice afin d’effectuer un inventaire des objets et biens se trouvant dans l’église. Le recteur et le marguillier de la paroisse, en accord avec l’Administration Diocésaine, leur ont interdit l’accès de la cathédrale et ont immédiatement engagé en référé une action en rétractation, afin de contester le bien fondé de l’assignation. Le tribunal de Nice a donné finalement raison à notre association : le président a reconnu n’avoir pas suffisamment d’éléments pour permettre à la Fédération de Russie de procéder à cet inventaire. Il n’y a pas eu appel de cette décision de la part de la Fédération de Russie. Mais en novembre dernier la Fédération de Russie a assigné sur le fond notre association pour affirmer son droit de propriété sur cette cathédrale, tout en déclarant ne pas vouloir modifier ses conditions d’occupation par une paroisse dépendant de notre Archevêché. L’affaire est en cours et je me garderai bien de commenter à ce stade cette procédure sur le fond. Une affaire de cette nature s’apprécie en vertu des règles de droit et en équité. Il nous semble que nous avons une bonne défense sur le plan juridique : nous verrons bien. Mais sur le plan de l’équité, le caractère choquant de la démarche de la Russie n’a échappé ni aux commentateurs, ni aux habitants de Nice qui ont immédiatement pris fait et cause pour la défense de la cathédrale : pour récupérer « son » bien, l’Etat russe invoque le fait d’être le successeur de l’Union Soviétique, née de la révolution bolchevique dont les dirigeants ont ordonné l’exécution du tsar et de sa famille, tsar à qui appartenait le bien en question, voilà qui est tout à fait inique !!!

Je le dis en pleine conscience : cette affaire est tragique pour nous tous. C’est une erreur majeure pour l’image de la Russie moderne en France. Je regrette vivement que, alors que certaines voix en Russie même évoquent la restitution des biens des Russes spoliés par le gouvernement soviétique, voici que le gouvernement de la Russie moderne s’en prend aux rares biens que nos grands-parents ont sauvegardé comme les ultimes vestiges de leur patrie perdue et qu’ils ont entretenus et enrichis comme ils l’ont pu et souvent, comme à Nice ou en d’autre lieux, en y consacrant beaucoup de ce qu’ils avaient pu préserver.

Il s’agit en fait de beaucoup plus que Nice ou Biarritz, mais bien de notre existence même en tant qu’ Orthodoxes de tradition russe vivant en Europe Occidentale : vouloir comme le fait le Patriarcat de Moscou nous « prendre » nos églises en affirmant qu’elles reviennent à l’Eglise-mère comme cela a été annoncé pour Biarritz, au lendemain du coup de force du 26 décembre 2004, sur le site du Patriarcat de Moscou, c’est tout simplement nier notre existence ecclésiale en tant que descendants par le sang ou par l’esprit de la tradition russe et vivant ici en Europe Occidentale depuis plusieurs générations. C’est nier la spécificité de notre situation territoriale et nationale : nos paroisses sont largement multi-ethniques, nos paroissiens sont élevés dans les traditions culturelles de l’Europe Occidentale, traditions qui sont, quoiqu’on en dise, différentes de celles dans lesquelles nos frères dans la foi, ou nos cousins par le sang, ont été élevés en Russie : si, parmi ceux qui sont ici d’origine russe, tous, nous avons voulu d’une façon ou d’une autre participer au renouveau de la Russie moderne, chacun à sa façon, dans sa spécialité, très rares sont ceux qui ont souhaité s’y installer définitivement « avec toutes leurs affaires ». Qu’on le veuille ou non, l’enracinement dans un territoire et dans une culture spécifiques est une donnée incontournable qu’il faut accepter. Les Eglises territoriales qui vivent sur des territoires différents ne sont pas divisées pour autant : dans l’Eglise, l’appartenance à des territoires différents ou à des traditions culturelles différentes est secondaire par rapport à l’unité de la foi et à la communion dans le même Esprit. Notre vie, ici, depuis plus de soixante quinze ans sous l’omophore du Patriarcat Œcuménique ne nous a nullement empêchés, bien au contraire, ni de soutenir les Croyants persécutés du temps de l’Union Soviétique, ni de venir en aide aux différents institutions ou communautés qui sont aujourd’hui dans le besoin, ni évidemment d’être en communion de prières avec nos frères de Russie. Nul besoin dans l’Eglise Orthodoxe de se trouver sous le même omophore pour être en communion et dans l’unité.
Nous aspirons, nous demandons, nous exigeons d’être reconnus comme des chrétiens orthodoxes à part entière, issus de la tradition russe, c’est-à-dire nous y référant et nous en inspirant sans exclusive – parce qu’il y a ici aussi en Europe Occidentale de très riches apports vivants de la haute spiritualité – mais tâchant de vivre pleinement leur foi orthodoxe, ici et maintenant, dans les conditions de vie et de témoignage qui sont les nôtres, avec nos difficultés et nos faiblesses qui sont grandes mais aussi avec nos joies qui ne le sont pas moins.


C. Perspectives.

Pour finir, je voudrais soumettre à notre réflexion un autre aspect de notre activité. Nous avons aussi réuni, le 8 novembre 2005 certains des représentants des organismes ou initiatives ayant une portée caritative et sociale dans notre Archevêché : nous sommes partis de la constatation qu’une Eglise se devait aussi, pour appuyer son témoignage, développer une action en faveur des plus pauvres et des plus démunis. Nous savons bien qu’ils sont aujourd’hui nombreux, que beaucoup viennent d’Europe de l’Est et sont chrétiens orthodoxes. Notre Archevêché a été le lieu d’un grand nombre d’initiatives de ce type tout au long de son existence. La plus connue est incontestablement l’Action Orthodoxe de Sainte Mère Marie (Skobtsev) et de ses compagnons canonisés récemment mais il y en eut beaucoup d’autres moins connus mais aussi dévoués comme Alla Erofeevna Matteo, Sofia Mihailovna Zernova ou le Père Valentin de Bachst et sa matouchka, par exemple.

A cette réunion nous avons fait le tour, bien sûr non exhaustif, des initiatives et services existants, notamment en faveur de l’accueil des étrangers. Ils existent et c’est bien. Mais ils sont limités : comme si cette question, celle de l’accueil et du service de l’étranger et du pauvre, n’est pas perçue, n’est plus perçue, comme en rapport direct avec la foi ou la vie de l’église. Il y là matière à une sérieuse remise en question : alors que dans toutes nos paroisses il y avait, -il y a encore parfois- un comité ou cercle d’aide dynamique et vivant, n’y a t-il pas matière à nous organiser ensemble pour entreprendre un geste ecclésial sans doute modeste, mais réel, envers nos frères ? Et une église qui ne porte pas, constamment, le souci de l’étranger, du pauvre, du vieillard isolé, peut elle encore sérieusement se proclamer comme fidèle à l’enseignement du Christ ? Cette question vient s’ajouter à la liste de celles, nombreuses, dont vous a parlé Monseigneur l’Archevêque Gabriel sur lesquelles aura à se pencher le prochain conseil.

Vous le voyez, chers Pères, frères et sœurs en Christ : il y a beaucoup de tâches qui vous attendent, qui nous attendent. Nous vous appelons à y prendre part, à ne pas hésiter à vous engager, à faire preuve de créativité. Nous lancerons de nouvelles initiatives dans les prochains mois. Venez nous aider dans cet effort.

Tout ce que nous faisons nous le faisons exclusivement pour le service de l’Eglise. Nous y mettons tout notre cœur et notre énergie. Pardonnez nos manquements qui sont, nous le savons, nombreux. Nous recevrons avec gratitude tous les conseils et les orientations que vous voudrez bien nous donner. Ensemble, nous pourrons faire progresser la vie de notre Archevêché c’est à dire être fidèles à notre vocation de chrétiens orthodoxes ici et maintenant. Je vous remercie pour votre attention.


Michel Sollogoub

30 avril 2007